Cette équipe de la Korea University Medicine suggère un nouveau biomarqueur pour la dépression majeure : un index de gyrification local, qui mesure le repliement cortical dans le cerveau, et constitue un marqueur lisible à la neuroimagerie. Alors que la gyrification cérébrale a déjà été associée à différents troubles neurologiques, ces travaux, publiés dans la revue Psychological Medicine, confirment tout l’intérêt diagnostique de ce marqueur de neuroimagerie.
En apparence, la couche la plus externe du cerveau humain, appelée cortex, est un labyrinthe de plis tissulaires. Les sommets ou surfaces surélevées de ces plis, appelés gyri, jouent un rôle important dans le bon fonctionnement du cerveau. Une mauvaise gyrification ou formation de gyri a déjà été impliquée dans différents troubles neurologiques, dont la dépression majeure.
Si de précédentes recherches l’avaient donc déjà suggéré, cette étude confirme aujourd’hui que des modèles de repliement corticaux anormaux sont bien associés à la dépression : « Notre étude, la première du genre, confirme l'association de l'indice de gyrification local ou de plusieurs régions corticales et avec l’incidence et les caractéristiques cliniques de la dépression », commente l’un des auteurs principaux, le Dr Byung-Joo Ham de L’université de Corée.
Mais qu'est-ce que l'index de gyrification local (IGL) ?
Cet index est une mesure du repliement cortical, dérivée des scintigraphies cérébrales, et qui représente en pratique le rapport entre les surfaces courbes et les surfaces lisses du cortex dans une zone d'intérêt donnée.
L’étude a ainsi comparé les valeurs de l’IGL de plusieurs régions corticales du cerveau de patients atteints de dépression majeure avec cl’IGL de témoins en bonne santé. Les données de neuroimagerie utilisées pour comparer et analyser les 2 groupes ont été obtenues à partir d'IRM.
- les valeurs de l’IGL de plusieurs régions corticales du cerveau de patients atteints de dépression majeure suggèrent une « hypogyrification » c’est-à-dire une diminution du repliement cortical vs les personnes en bonne santé ;
- les patients atteints de dépressions ont des valeurs d’IGL significativement plus faibles dans 7 des 66 régions corticales évaluées dans les 2 hémisphères du cerveau ;
- chez ces patients, l'hypogyrification la plus significative est observée dans la pars triangularis gauche, une zone du gyrus frontal inferieur gauche, qui pourra donc être plus spécifiquement analysée à l’imagerie.
Alors que les régions corticales évaluées dans l’étude affectent la régulation émotionnelle, ces schémas de repliement corticaux anormaux, retrouvés chez les patients atteints de dépression, pourraient tout à fait être associés au dysfonctionnement des circuits neuronaux impliqués dans la régulation émotionnelle, ce qui contribuerait à expliquer la physiopathologie du trouble dépressif.
Dans l’attente, l’IGL est documenté comme un marqueur de dépression prometteur, à la neuroimagerie et relativement stable de la dépression, en comparaison des autres biomarqueurs précédemment identifiés. En effet, l’IGL reflète le processus de développement de longue haleine de la gyrification qui ne peut être affecté par l'état d'un patient à un moment donné. D’autant que d’autres caractéristiques cliniques du trouble dépressif majeur, dont la récurrence et la durée de la maladie s’avèrent en revanche associées à une gyrification accrue dans plusieurs autres régions corticales, occipitales et temporales.
De prochaines recherches vont explorer les facteurs génétiques qui peuvent prédisposer à une gyrification anormale et donc à cette voie vers la dépression. Enfin, l’étude désigne de nouvelles régions corticales, cibles de traitements.
Source: Psychological Medicine 8 May, 2023 DOI:10.1017/s0033291723001216 Decreased Cortical Gyrification in Major Depressive Disorder
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